COVID-19 : Reprise du travail et activité partielle
Alors que la fin de l’état d’urgence sanitaire a été fixée au 10 juillet 2020, les phases successives de déconfinement permettent une reprise partielle de l’activité.
Les entreprises sont confrontées aux questions pratiques relatives au déconfinement, que ce soit le retour des salariés sur le lieu de travail ou l’adaptation de l’arsenal d’outils mis à la disposition des employeurs durant la période de confinement.
Parmi ces règles, l’activité partielle a permis à plus de 810 000 entreprises de bénéficier d’un soutien financier estimé à 4,2 milliards d’euros (chiffres au 22 avril 2020) et de sauvegarder l’emploi durant la période de confinement.
Aujourd’hui, les règles relatives à l’activité partielle ont été adaptées pour permettre une reprise progressive de l’activité.
L'individualisation de l'activité partielle
Dans le cadre de la reprise progressive de l'activité économique, le Gouvernement a souhaité permettre aux entreprises d’individualiser l’activité partielle afin d’adapter cette mesure aux besoins de chaque société.
En effet, en principe, l’activité partielle est une mesure collective en application de l’article L. 5122-1 du Code du travail. La réduction ou cessation d’activité doit concerner tout l’établissement, ou une « partie d’établissement » correspondant à une unité de production, un atelier ou encore un service.
Désormais, l’article 8 de l'ordonnance n°2020-460 du 22 avril 2020, modifiant l’article 10 ter de l'ordonnance n°2020-346 du 27 mars 2020, et entré en vigueur le 23 avril2020, prévoit que l’employeur peut :
- « placer une partie seulement des salariés de l’entreprise, d’un établissement, d’un service ou d’un atelier, y compris ceux relevant de la même catégorie professionnelle, en position d’activité partielle » (ex : au sein du même service, un salarié travaille normalement à 100 % tandis qu’un autre salarié est placé en activité partielle à 100 %) ;
- « ou appliquer à ces salariés une répartition différente des heures travaillées et non travaillées » (ex : au sein du même service, un salarié a un niveau d’activité de 50%, un autre de 80% et un autre de 30%).
Afin d’être valablement mise en place, l’activité partielle individualisée doit être nécessaire au « maintien ou [à] la reprise d’activité». Par ailleurs, l’individualisation de l’activité partielle doit être prévue par un accord collectif (accord d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, de convention ou d’accord de branche). À défaut d’accord, l’employeur peut recourir à l’activité partielle individualisée par décision unilatérale, mais il doit alors obtenir un avis favorable du comité social et économique (« CSE ») ou du conseil d’entreprise (« CE »).
L’accord, ou le document, soumis à l’avis du CSE ou du CE détermine notamment :
- les compétences identifiées comme nécessaires au maintien ou à la reprise de l’activité de l’entreprise, de l’établissement, du service ou de l’atelier ;
- les critères objectifs, liés aux postes, aux fonctions occupées ou aux qualifications et compétences professionnelles, justifiant la désignation des salariés maintenus ou placés en activité partielle individualisée ou faisant l’objet d’une répartition différente des heures travaillées et non travaillées ;
- les modalités et la périodicité selon lesquelles il est procédé à un réexamen périodique des critères liés aux postes, aux fonctions ou aux qualifications et compétences professionnelles, afin de tenir compte de l’évolution du volume et des conditions d’activité de l’entreprise en vue, le cas échéant, d’une modification de l’accord ou du document. Cette périodicité ne peut être inférieure à 3 mois ;
- les modalités particulières de conciliation de la vie professionnelle et la vie personnelle et familiale des salariés concernés ;
- les modalités d'information des salariés sur l’application de l’accord pendant toute sa durée.
Les accords et décisions unilatérales pris en application de ce texte cessent de produire effet à une date fixée par décret, et au plus tard au 31 décembre 2020.
Qu'en est-il des salariés protégés en cas d'individualisation du placement en activité partielle ?
Pour rappel, l’ordonnance n° 2020-346 du 27 mars 2020, entrée en vigueur le 28 mars 2020, avait supprimé la nécessité d'obtenir l'accord du salarié protégé (délégué syndical, élu du comité social économique, etc.) avant leur mise en activité partielle dès lors que la mise en place de l’activité partielle concerne tous les salariés de l’entreprise, de l’établissement, du service ou de l’atelier auquel est affecté ou rattaché le salarié protégé concerné (voir notre newsletter du 15 avril 2020).
À contrario, si tous les salariés de l’entreprise ne sont pas dans la même mesure, le salarié protégé est en droit de refuser le passage en activité partielle.
En conséquence, le salarié protégé est en droit de refuser la mise en activité partielle individualisée dès lors que celle-ci ne concerne pas tous les salariés de l’entreprise, de l’établissement, du service ou de l’atelier auquel le salarié protégé appartient.
Bascule des personnes en arrêt de travail dérogatoire vers l'activité partielle (loi n°2020-473 du 25 avril 2020 de finances rectificative pour 2020 publiée au JO le 26 avril 2020)
L’article 20 de la loi de finances rectificative pour 2020 prévoit le placement en activité partielle des salariés qui étaient jusqu’alors en arrêt de travail dérogatoire pour les motifs suivants :
- le salarié est une personne vulnérable présentant un risque de développer une forme grave d'infection au virus SARS-CoV-2, selon des critères définis par décret ;
- le salarié partage le même domicile qu'une personne vulnérable au sens du deuxième alinéa du présent;
- le salarié est parent d'un enfant de moins de seize ans ou d'une personne en situation de handicap faisant l'objet d'une mesure d'isolement, d'éviction ou de maintien à domicile.
Depuis le 1er mai, ces personnes basculent sous le régime de l'activité partielle et perçoivent l’indemnité d'activité partielle qui n'est pas cumulable avec l'indemnité journalière.
En pratique, l’employeur doit déposer une demande d’activité partielle dans le site du gouvernement: https://activitepartielle.emploi.gouv.fr/aparts/
La durée d’application de ce texte et de prise en charge de ces salariés au titre de l’activité partielle varie :
- pour les salariés vulnérables et celles demeurant avec une personne vulnérable, la date sera fixée par décret (au plus tard 31 décembre 2020) ;
- pour les salariés parents d’un enfant de moins de seize ans ou d’une personne en situation de handicap, l’activité partielle s'applique pour toute la durée de la mesure d'isolement, d'éviction ou de maintien à domicile concernant leur enfant,
À noter que les questions-réponses du ministère du Travail sur l'activité partielle mis à jour le 3 juin 2020 prévoit que le maintien ou la mise en activité partielle des parents gardant un enfant de moins de 16 ans ne peut se faire que sur présentation d'une attestation de l'établissement d'accueil indiquant que l'établissement ne peut accueillir l'enfant.
Or, depuis le 22 juin 2020, les crèches, écoles maternelles et élémentaires ainsi que les collèges, ont pu à nouveau accueillir tous les élèves. Cette « rentrée obligatoire » implique donc une reprise professionnelle pour les parents. Ainsi, les parents qui, dorénavant, ne souhaiteraient pas envoyer leurs enfants à l’école, devront désormais poser des jours de congés ou de RTT, l’attestation de l’établissement d’accueil n’étant plus délivrée.
Activité partielle : Évolution de la prise en charge de l'activité partielle au 1er juin 2020 (Ministère du Travail, 25 mai 2020, communiqué de presse)
Depuis le 1er juin 2020, les conditions de prise en charge de l’indemnité d’activité partielle ont été revues.
Par un communiqué de presse en date du 25 mai 2020, le Ministère du travail a précisé que :
- l’indemnité versée au salarié allait rester inchangée : pendant l’activité partielle, il percevra 70 % de sa rémunération brute (environ 84% du salaire net), et au minimum le SMIC net ;
- la prise en charge de cette indemnité par l’Etat et l’Unédic sera de 85 % de l’indemnité versée au salarié, dans la limite (inchangée) de 4,5 SMIC. Les entreprises seront ainsi remboursées de 60 % du salaire brut, au lieu de 70 % précédemment ;
- les secteurs faisant l’objet de restrictions législatives ou réglementaires particulières en raison de la crise sanitaire, continueront à bénéficier d’une prise en charge à 100%.
Ces mesures devront être mises en œuvre par ordonnance et par décret.
Nouvelles mesures à venir pour pérenniser l'activité partielle post-confinement
La loi n° 2020-734 du 17 juin 2020 relative à diverses dispositions liées à la crise sanitaire, à d'autres mesures urgentes ainsi qu'au retrait du Royaume-Uni de l'Union Européenne, publiée au JO le 18 juin 2020, prévoit des dispositions notamment en matière d’activité partielle. Des décrets, pour la mise en application de certaines dispositions de la présente loi, seront publiés prochainement.
Il est notamment prévu :
- la création d’un dispositif spécifique d’activité partielle dit « activité réduite pour le maintien en emploi », permettant aux entreprises confrontées à une réduction d’activité durable de réduire l’horaire de travail en contrepartie d’engagements de maintien de l’emploi, sous réserve de la conclusion d’un accord collectif d’établissement, d’entreprise ou de groupe ou d’un accord collectif de branche étendu ;
- la mise en place de mécanismes permettant de monétiser des jours de repos et de congés pour compléter la rémunération des salariés en activité partielle ;
- la possibilité de fixer par accord d’entreprise les règles relatives au renouvellement et à la succession des CDD et des contrats d’intérim et de déroger à la durée maximale des contrats, jusqu’au 31 décembre 2020 ;
- la possibilité pour les entreprises de moins 11 salariés, sans délégué syndical ni CSE, de se doter d’un dispositif d’intéressement sur décision unilatérale de l’employeur.
Ainsi, l’activité partielle s’adapte à la reprise d’activité afin d’accompagner les entreprises dans la phase de reprise progressive de l’activité. Cette mesure phare agencée et affinée à plusieurs reprises durant la période de crise sanitaire Covid-19 a toutefois permis la continuité de l’activité en France.